La Gambie est un petit pays africain peu connu, ce sont mes premiers pas en Afrique de l’Ouest, ce pays m’intriguait car tout petit, tout en longueur, anglophone et enclavé dans le Sénégal francophone.
Ce voyage de deux semaines a été effectué en juin 2002, les photos sont des photos scannées.
La Gambie m’a bien plu, j’y ai vécu des moments intenses, parfois cocasses et gênants mais j’y ai fait de belles rencontres.
Quelle bonne surprise et quel beau voyage plein d’émotion !
Entre gros dépaysement et belles rencontres, voici quelques souvenirs marquants de ce voyage en terre gambienne.
Farafenni
Après un atterrissage aux aurores à Dakar et une tentative d’arnaque houleuse, je me retrouve à la gare des taxis brousse, direction la Gambie. Dans le taxi brousse tout le monde est entassé mais la bonne humeur est là, en écoutant la retransmission d’un match de la coupe du monde de foot. C’est ma première fois en Afrique de l’Ouest, quel dépaysement, je n’en perds pas une miette pendant le trajet, les yeux grand ouverts malgré la fatigue due au vol de cette nuit. De l’autre côté de la vitre, c’est un défilé de villages de cases, de marchés, de paysage de brousse, de baobabs, de femmes habillées d’habits très colorés, d’animaux divers et variés (chèvres, vautours, buffles,…) et même de contrôles de police.
La frontière est passée sans encombres et même avec le sourire des douaniers, de l’autre côté je me retrouve vite à Farafenni, mon stop pour la nuit.
C’est un village typique, c’est jour de marché, les gens parlent soit français soit anglais, je ne passe pas inaperçu.
Le dépaysement est total, un peu comme en Inde, et c’est ce que je recherche, j’adore ! Par contre je suis surpris de voir des gens arborer des t-shirts de Ben Laden…
Je suis vite invité à boire le thé chez Mané (qui travaille à l’hôtel où je loge), il vit avec ses deux femmes et son enfant dans une petite
maison. Leur quotidien est dur, un de ses enfants est mort du paludisme et une de ses femmes a une crise en ce moment, bienvenue en Afrique !
Jour de marché à Farafenni
Crédit photo : club-des-voyages.com
Basse Santa Su
Bienvenue en pleine brousse !
Après une bonne nuit réparatrice, c’est le départ pour Basse Santa Su. Je dois prendre un taxi brousse pour aller au bord du fleuve Gambie, puis prendre un petit bateau pour traverser le fleuve, pour ensuite reprendre un taxi brousse pour un bled, d’où je prendrai un minibus pour Basse Santa Su. J’ai très vite l’occasion de gouter à la gentillesse des gambiens, ils sont aux petits soins avec moi. Le trajet est long, sur une route pleine de nids de poule, nous longeons le fleuve pratiquement jusqu’à l’extrémité Est du pays. C’est un défilé de paysage de brousse, de villages de cases et comme au Sénégal, pas mal de contrôles de police.
Basse est une petite ville très animée, les gens sont très sympas, je me balade vers le fleuve. Les enfants se baignent, les femmes lavent le linge, des hommes se lavent, je regarde les va et vient des barques et petits ferrys qui traversent le fleuve. Le coucher du soleil sur le fleuve est sympa !
Un village de brousse
Une nuit agitée
Je loge à la Basse guesthouse, en plein centre-ville, elle n’est pas chère, avec une grande terrasse pour regarder les scènes de la rue. J’y ai
laissé mes affaires dès mon arrivée et je repars vite explorer la ville.
Quand je reviens à l’hôtel la nuit tombée, surprise ! Il y a du monde partout, que des locaux, je suis le seul touriste. La musique est à fond, l’alcool coule à flot, des femmes légèrement vêtues et entreprenantes déambulent dans l’hôtel, certaines me saluent avec un air aguicheur. Je passe aux toilettes communes avant d’aller de dormir, c’est à vomir : un mélange d’excréments et de capotes usagées jonchent les toilettes. Je me réfugie dans ma chambre en bouclant ma porte : je suis dans un hôtel de passe !
Je me dis « quelle nuit je vais passer ! », surtout que plusieurs fois dans la nuit des prostituées toqueront à ma porte et imaginez les bruits de cris, de musique, de rires, malgré les bouchons d’oreille.
Au petit matin je fais mon sac et pars à la recherche d’un meilleur endroit pour dormir. Quelle nuit !
Sur le fleuve Gambie
Lors de mon arrivée à Basse, j’avais rencontré Marcos, qui possède une barque et qui m’a proposé une balade sur le fleuve. Le lendemain matin nous nous retrouvons et c’est parti pour une chouette balade de plus de deux heures au fil de l’eau. Les rives sont boisées, les oiseaux sont nombreux : des martins pêcheurs, des aigrettes, des hérons, des perruches et perroquets et d’autres dont je ne connais pas le nom. Ça fait du bien de se retrouver en pleine nature, en retrait de l’agitation de Basse.
Sur le fleuve Gambie
Marcos, mon « boatman » sur le fleuve
Gunjur beach
Après une longue traversée chaotique de quasi toute la longueur du pays, je me retrouve à Gunjur. C’est un village de pêcheurs au sud de la côte gambienne. J’ai tellement aimé ce lieu que j’y suis resté une semaine. J’avais choisi d’aller à cet endroit car il est peu touristique (je serai le seul touriste durant 1 semaine de séjour à Gunjur !), contrairement à la côte plus au nord (vers Serrekunda) qui est ultra touristique. En effet, des charters venant d’Angleterre débarquent par centaines des touristes anglo saxons en quête de plage, d’exotisme et parfois d’ «amour tarifé».
Gunjur n’est pas une plage de rêve, elle est à l’image de l’Afrique, « roots », sauvage, dans son jus. Le sable est blond, il n’y a pas de snorkeling à faire, il y a souvent un peu de houle (c’est l’océan atlantique), il y a parfois des vaches sur la plage, des poissons qui sèchent au soleil, des vautours autour de cadavres de poissons ou même de tortue luth. Il y a peu de cocotiers, ce sont plutôt d’autres espèces de palmiers où nichent des perroquets multicolores et il y a même des baobabs . En arrière de la plage, c’est la brousse et la mangrove, un autre monde, une autre facette des paysages africains.
La plage
Derrière la plage
La préparation du délicieux « African green tea »
Retour de pêche sur la plage
Gunjur est un village de pêcheurs. Chaque matin, au lever du soleil, les bateaux partent en mer, pour revenir dans l’après-midi, et là quel spectacle ! Quand les bateaux arrivent au loin, les femmes arrivent avec leur seau, parfois en chantant et en tapant sur leur seau. Dès que les bateaux accostent, le poisson est trié et vendu, tout ça dans une joyeuse cacophonie, les mouettes affluent et s’affolent. Cette arrivée des bateaux est un spectacle dont je ne me lasse pas chaque jour. Suivant les jours il y a du « bonga fish », des carangues, des barracudas, des « lady fish » (elops) et même du requin… J’achète parfois un poisson pour qu’on me le cuisine avec du riz et que je partage avec d’autres personnes, parfois on me l’offre.
L’effervescence à l’arrivée des bateaux !
Le nettoyage du poisson sur la plage
Le départ à la pêche au lever du soleil
Abuko Nature Reserve
Une oasis de verdure
C’est une bonne surprise de trouver cet écrin de nature à cet endroit-là, entre le fleuve, la capitale, la ville de Brikama et les plages très touristiques.
A l’entrée, des panneaux de prévention expliquent les problématiques écologiques et sociétales de la Gambie (et de l’Afrique en général): il faut préserver la nature, la faune et il faut réguler les naissances pour limiter la pression démographique.
En tout cas je n’ai pas été déçu par cette visite, j’y croise de rares touristes mais surtout pas mal d’animaux. La végétation est luxuriante, des points de vue cachés et des miradors permettent d’observer les animaux autour de mares. Des daims viennent s’abreuver, des crocos dorment à la surface de l’eau, des singes s’ébattent dans les arbres, des oiseaux (aigrettes, martins pêcheurs, hérons) guettent les poissons dans la mare, je vois même un majestueux aigle pêcheur. En marchant en forêt, des sortes de pintades, d’autres singes et des varans détalent à ma vue.
A côté de la réserve se trouve un centre de réhabilitation ou orphelinat où se trouvent des hyènes, des lions et des sortes de grandes grues. Les hyènes sont impressionnantes.
Callithrix monkey
Abuko nature reserve
No comment, à méditer !
Banjul
Une dernière nuit chaude en Gambie !
A Banjul, capitale de la Gambie, je suis en train de manger dans la cour d’un bouiboui. A la table d’à côté, des asiatiques mangent et éclusent des bières.
On commence à discuter, ce sont des marins philippins en escale. Ils me montrent des photos de leurs copines, femmes et enfants qui leur manquent, ça fait plusieurs mois qu’ils les ont quittés. Ils me proposent de me faire visiter leur cargo, Ok allons-y !
Pendant la visite du cargo la nuit tombe et on revient au « bouiboui ». On se rassoit car ils veulent m’offrir une bière, pas de refus ! Et tout à coup déboulent de nulle part des prostituées qui s’assoient à côté de chacun d’entre nous. Ces prostituées sont très entreprenantes, les philippins se laissent faire, comme si c’était normal et en redemandent. Moi je suis gêné, les philippins voient mon embarras et me disent : « don’t worry, it’s our gift* » (« t’inquiète pas, c’est cadeau ! »), croyant que c’était une histoire d’argent…
Voyant que je suis toujours aussi coincé malgré la « charmante » demoiselle à côté de moi de plus en plus entreprenante, ils commencent à se vexer, me demandent quel est le problème. Je ne vais pas leur dire que je suis contre ça, qu’il y a les maladies, que je ne veux tout simplement pas…, je m’en tire en disant que je suis fiancé et que je me marie au retour de mon voyage, que je ne veux être infidèle à ma future femme (cette histoire est fausse bien sûr mais je ne sais pas quoi inventer d’autre). En tout cas ils s’en satisfont ouf !
Au bout de quelques bières je les laisse en "agréable" compagnie finir leur nuit, je m’en tire à bon compte, je rentre à mon hôtel, quelle dernière nuit !
Que de belles rencontres !
Les gambiens sont des gens extrêmement accueillants, bienveillants, toujours prêts à discuter ou à boire le thé africain!
Grace à eux j’apprends que la Gambie est peuplée d’une diversité ethnique importante (mandingues, peuls, jula, sérères, wolofs, …), qui semble cohabiter en harmonie. En relisant mon carnet de voyage, je me suis aperçu que j’ai fait énormément de belles rencontres, sans elles, le voyage aurait été fade, sans saveur. Donc pour finir, voici quelques portraits de sympathiques gambiens rencontrés au cours de ce voyage (parmi tant d’autres !), merci à eux d’avoir contribué à la réussite de ce beau séjour en terre gambienne !
Aladdin l’ancien « boomster »
Un boomster est un « beach boy », un jeune garçon qui est là, « en chasse », sur la plage, pour
séduire des touristes. C’est de la prostitution déguisée, ils séduisent des femmes seules plus ou moins naïves pour leur soutirer un maximum d’argent mais tout en douceur, en leur faisant croire
à l’amour, ils font de sacrés dégâts !
Aladin est un ancien boomster, un peu le caïd de Gunjur, un grand consommateur de pétards, il m’a pris sous son aile dès mon
arrivée à Gunjur, sans arrière-pensée. Il m’a invité plusieurs fois chez lui, pour boire le thé, pour manger du poisson fraichement péché. Je dois bien avouer que parfois il était collant. Mais sans
lui, je n’aurais pas fait le même voyage. Il me disait souvent en parlant de nous deux : « not the same colour of skin, but the same colour of blood », un beau slogan anti
racisme.
Sabati « the preacher »
C’est d’abord chez lui que je voulais loger, il possède une sorte de resort « roots » (Rasta Kunda) en bord de plage mais il a été
vandalisé pendant qu’il était en voyage en Europe. Il vit un peu en marge du village, il est autodidacte, extrêmement gentil, un homme bon et sage, avec beaucoup de charisme, j’ai passé de très
bons moments avec lui.
N’Deye Sene, Kpumba Faye, Khady Sarr et Amy Diouf
Une belle rencontre sur la plage, elles ont gentiment posé pour moi avec leurs enfants, elles font partie des femmes qui viennent récupérer et vendre le poisson à l’arrivée des bateaux.
Lamin, le frère d’Aladin
Plus jeune, plus calme, rastafari et moins torturé que son frère, il fait le commerce du cannabis dans le village. Lamin et son frère Aladin en font pousser illégalement et en consomment pas mal, comme beaucoup de jeunes du village.
Aladin, le caïd de la plage
Lamin, le frère d’Aladin
Sabati prépare notre repas
N’Deye Sene, Kpumba Faye, Khady Sarr, Amy Diouf et leurs enfants
Dembo
Il tenait le « telecenter » de Gunjur beach. C’est un homme simple, gentil, avec qui j’avais plaisir à discuter à chaque fois que je passais devant son commerce.
Ousmane, Ablaye et la cuisinière sénégalaise
Quand j’achetais un poisson ou qu’on m’en donnait un, c’est à leur « boui-boui » que j’allais pour que
la cuisinière sénégalaise le cuisine avec du riz, des légumes, des oignons, du chili,… que l’on dégustait ensuite tous ensemble, dans une grande gamelle, en mangeant avec la main droite bien sûr.
Un bon moment de partage et quel délice !
Fode n’dour l’artiste
Un soir je me balade sur la plage, parmi les beaux bateaux de pêche joliment décorés, je tombe sur Fode n’dour,
il est en train de peindre un bateau, nous discutons longtemps, il est très cultivé. Il me dit entre autre qu’il est de la même ethnie que Youssou
n’dour : sérère, il me parle de l’Afrique, de son pays, il m’énumère les différentes ethnies d’Afrique de l’ouest et je m’aperçois encore que
les découpages des frontières n’a pas tenu compte des peuples qui y habitent, comme ça peut l’être dans pas mal d’autres endroits (Pakistan, Afghanistan, Chine,…). Je le recroiserai 2/3 fois encore lors de mon séjour.
Keba
Keba est un gamin attachant, souriant, débrouillard, intelligent.
Anju
Anju est le gérant ou homme à tout faire de l’hôtel où je loge (le « Sankule’s Ju Ju warriors »), le proprio est un anglais qui était chez lui à ce moment-là.
Anju est une personne adorable, un mec en or, toujours de bonne humeur et aux petits soins. A mon départ de Gunjur, il m’a fait cadeau d’un beau pendentif, que
j’ai toujours 17 ans après.
Ousmane, Ablaye et la cuisinière sénégalaise
Dembo
De beaux sourires
Partie de Djembe avec Keba au centre et Anju à droite
coucher de soleil et ombres chinoises à Gunjur
Voici donc mes souvenirs de ce beau voyage en Gambie, comme vous l'avez lu, j'aurais pu appeler l'article "sex, marijuana & reggae"! J’aimerais tant savoir ce que sont devenus ces lieux et ces personnes.
Comme je l’ai dit, il date de 2002, les photos sont scannées, un grand merci à David H. pour les avoir améliorées !
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Manola (mardi, 22 octobre 2019 20:32)
J ai bien-aimé te lire...bon, pas un endroit pour moi, mais c est très coloré..et je découvre sur la carte ce pays....
selamat jalan (mercredi, 23 octobre 2019 09:18)
Merci Mano!
En effet c'est l'Afrique, un monde à part!
Bises.
Carine (samedi, 26 octobre 2019 20:14)
Oh, chouette ce carnet ! Un voyage qui sort des sentiers battus ! Rare de voir des gens qui partent en Gambie :)
Belle découverte. Merci.
Selamat jalan (dimanche, 27 octobre 2019 08:44)
En effet un voyage un peu hors des sentiers battus, un peu différent et très dépaysement !
Merci !
David H (mercredi, 30 octobre 2019 09:11)
Très bon reportage
selamat jalan (mercredi, 30 octobre 2019 13:02)
Merci David!